PERSEPOLIS

Vu hier le merveilleux film d’animation de Marjane Satrapi et Vincent Paronnaud : PERSEPOLIS, d’après la BD éponyme de Marjane Satrapi.

La BD de Marjane est autobiographique : Iranienne, issue d’un milieu aisé, intellectuel et engagé, elle a vécu dans son enfance la révolution qui a chassé le Chah, puis la prise du pouvoir par les mollahs, et la guerre Iran-Irak. Le dessin, tout en noir et blanc, est simple et expressif. Avec humour, sans jamais tomber dans le pathos ni la victimisation, elle décrit les conditions de vie des Iraniens, l’oppression toujours grandissante, et le mépris que subissent en particulier les femmes. Au travers du regard d’une enfant puis d’une adolescente, elle nous raconte avec pédagogie l’histoire de l’Iran dans les années 80-90.

Dès dix ans, son père l’initie à la politique en lui faisant lire des BD sur l’histoire du marxisme, ses héros sont les révolutionnaires de sa famille ou proches de ses parents…Trop libre et trop frondeuse pour passer sans trop d’encombres ces années noires dans son pays, et afin de la sauver de la guerre, ses parents décident de l’envoyer en Autriche à quatorze ans. Elle y passera son adolescence, seule et loin de ses proches, cherchant par tous les moyens à se faire une place dans cette culture qu’elle ne connaît pas et qui assimile les Iraniens aux terroristes.
A la fin de la guerre elle revient au pays et se replonge dans la vie de son pays natal, toujours sous la coupe des intégristes…



Le film, tout en restant fidèle à la BD, l’enrichit de décors dans les tons gris et accélère le rythme de l’histoire notamment pendant la période autrichienne. Le code graphique de la BD est conservé, le trait reste simple, les mouvements sont fluides et étonnamment proches de la réalité. Pour régaler nos oreilles, Catherine Deneuve et Chiara Mastroianni prêtent leurs voix aux personnages de la mère et de la fille, Simon Abkarian incarne avec extrêmement de justesse la douceur du père et Danielle Darrieux est sublime dans le personnage de la grand-mère iconoclaste au franc-parler.

Ce film est une œuvre magistrale, politique et didactique. Il est urgent d’aller le voir en ces temps ou notre gouvernement projette de nous préparer « au pire » concernant l’Iran… On ne peut que se féliciter de savoir qu’il représentera la France aux Oscars 2008.

“J’ai voulu mettre au clair un certain nombre de choses”, explique Marjane Satrapi dans le studio où elle travaille avec d’autres artistes, place des Vosges à Paris. “Quand je suis arrivée en France, j’ai rencontré tant de gens qui me disaient: “Vous parlez arabe”?... Tant de gens ne font pas la différence entre les Arabes et les Iraniens. Ils ne savent rien de notre culture millénaire. Les gens ont la mémoire super-courte: ils croient que notre pays a toujours été un pays d’intégristes, que la femme n’a aucune place dans notre société, et que toutes les femmes iraniennes sont des corbeaux hystériques.
En fait, nous les femmes iraniennes, on n’est pas des mauviettes: la femme de ménage de ma mère est loin d’être opprimée: elle a mis son mari à la porte. Et moi-même, combien d’hommes j’ai giflé dans la rue après m’être fait insulter... Même pendant les années les plus terribles de la Révolution islamique, les femmes ont porté des armes... Il y a un autre point que je voulais souligner: tant de gens en Europe ont une véritable vénération pour le Chah. Pour moi le Chah était un salaud. Il faut le dire. Certes, il y avait quelques grands hôtels de luxe, le Hilton et le Sheraton, et quelques kilomètres d’autoroutes, mais quand il est parti la moitié de la population était illettrée et vivait dans une misère terrible: c’est inacceptable dans un pays ayant autant de pétrole, tout le monde aurait dû vivre de façon correcte”...
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« ... Quand Persepolis, la bande dessinée, est sortie aux Etats-Unis, j’ai voulu participer à des débats, principalement dans des Etats républicains. Invitée à l’académie militaire de West Point, en 2004, j’ai lancé aux officiers : ‘‘Si un seul d’entre vous refuse de s’engager en Irak, j’aurai fait mon devoir.” Un an plus tard, lors d’une conférence à Seattle, trois jeunes m’ont dit : ‘‘On vous a vue à West Point, on ne participera pas à cette sale guerre, on passe au Canada.” »
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Prochaines séances à Vitry-le-François : dimanche 23 / 09 [17 h 00]  et lundi 24 / 09 [20 h 45]